Robert de Laroche – Interview
L’auteur des enquêtes de Flavio Foscarini s’exprime au sujet de son dernier roman : Le maître des esprits.
Le maître des esprits est la suite de La vestale de Venise, un polar historique que vous avez publié l’année dernière. Était-ce la première fois que vous écriviez un polar ?
Ce n’est pas une suite, mais une histoire différente vécue par les mêmes personnages, et qui se déroule quelques mois après La vestale de Venise, qui était en effet mon premier roman policier historique.
Selon vous, peut-on lire Le maître des esprits indépendamment de La vestale de Venise ?
Oui, bien sûr, mais j’espère que les lecteurs qui découvriront Le maître des esprits auront envie de se plonger dans La vestale !
Voulez-vous faire des enquêtes de Flavio Foscarini une série de livres ? Quelles ambitions avez-vous pour ce cher Flavio ?
Je suis déjà en train de travailler à une troisième aventure, et j’aimerais donner ainsi naissance à une série. Je dois dire que je me suis attaché à mes personnages, et que j’aime me transporter par la pensée – et l’écriture – dans la Venise de la moitié du XVIIIe siècle. C’est une grande détente pour moi. Je suis curieux de voir comment Flavio va évoluer au fil des ans et des intrigues. Je sens qu’il restera fidèle à son caractère d’indépendance et de curiosité.
Pourquoi écrire une intrigue policière à Venise ? Qu’est-ce qui vous en a donné l’envie ?
J’ai eu la chance de passer beaucoup de temps à Venise. J’y ai vécu pendant plusieurs années, en alternant de longs séjours là-bas et ma vie en Normandie. J’ai accumulé une très grande documentation sur la ville et son histoire, la grande et la petite, sur ses mystères. J’ai commencé par écrire des livres plutôt documentaires, en collaboration avec des photographes, en particulier Chats de Venise (1991), avec Jean-Michel Labat, qui a remporté un énorme succès. Et puis des ouvrages sur le carnaval, la lagune, le Café Florian, des nouvelles et un premier roman. Le polar, c’est un défi que je me suis lancé, car j’aime beaucoup les polars historiques. Je dois dire que je me suis pris au jeu.
Dés le début de La vestale de Venise, le lecteur est en immersion dans la Venise du début du XVIIIe siècle en pleines fêtes du Carnaval, alors que Le maître des esprits commence par une mystérieuse et macabre découverte dans une chambre, chez un couple de nobles Vénitiens. Le deuxième volet des enquêtes de Flavio est donc bien plus sombre que le premier. Pourquoi ce choix ?
La vestale montrait un carnaval ponctué de meurtres horribles, donc ce n’était pas que joyeux ! Mais je voulais montrer dans Le maître des esprits une Venise automnale en proie à toutes sortes de manifestations qu’elle connaît bien (tremblements de terre, acqua alta) et ce qui pouvait arriver quand surgissait quelqu’un capable de manipuler les gens. C’est effectivement un roman très noir. Peut-être que ça correspondait à mon état d’esprit. Je dois dire qu’il était terminé quand a commence l’histoire du Covid 19. Donc, pas d’influence !
Comme dans tout bon roman historique, vous faites référence à beaucoup de lieux, de personnages et d’événements qui ont réellement existé. En ce qui concerne les personnages principaux (Flavio, Assin et Gasparo), sont-ils purement fictifs ?
Oui, il y a des personnages réels, comme le doge, la pastelliste Rosalba Carriera, la comtesse Barbarigo, la dramaturge Luisa Bergalli. Gasparo Gozzi, l’ami de Flavio, a existé lui aussi : c’était un journaliste et un auteur fort célèbre en son temps. Flavio et Assin Foscarini sont sortis de mon imagination. Pour Assin, j’ai un peu pensé à l’une de mes ancêtres syriennes. En revanche, Flavio est une création complète. Ah si ! il a deux chats, comme moi, et il est très curieux de nature. Moi aussi. Voilà nos points communs. Pour les décors dans lesquels se déroule l’action, ils existent tous, y compris le petit palais de Castello où vivent Assin et Flavio : j’ai eu la chance d’y habiter pendant douze ans, c’est vous dire si j’ai aimé le décrire, en le redécorant à mon idée !
Est-il difficile de mélanger fiction et Histoire ? Selon vous, quelle est la recette d’un bon roman historique ? Faut-il instruire et divertir à la fois ?
C’est un cocktail délicat. Il faut faire très attention à rester crédible quand on évoque des faits historiques réels, et faire en sorte que la fiction s’intègre bien au cadre historique et à une certaine réalité sociale de l’époque. Les commentaires de lectrices et de lecteurs m’ont montré qu’elles et ils appréciaient beaucoup d’apprendre des choses sur une ville qui suscite une grande curiosité chez ses amoureux. Donc je pense que c’est important de faire découvrir ou mieux connaître des lieux, des fêtes, des faits historiques et culturels réels, qui donnent à l’action une base plus solide.
Avez-vous d’autres projets d’écriture ?
Le troisième épisode des aventures de Flavio, auquel je travaille actuellement, et qui entraînera les lecteurs dans un univers différent des deux premières histoires.
Vous êtes actuellement écrivain et éditeur et avant cela, vous avez exercé un nombre impressionnant de métiers différents. Qu’est-ce qui vous a décidé à écrire ?
Oui, je continue d’animer une petite maison d’édition en Normandie, La Tour Verte. Et j’ai écrit une soixantaine de livres… L’écriture est venue naturellement, assez jeune. J’étais journaliste, j’écrivais beaucoup. J’ai toujours aimé raconter des histoires, et les partager.
Arrivez-vous à concilier votre métier d’auteur et d’éditeur ?
Pour le moment, oui. J’ai publié une cinquantaine de livres comme éditeur. Mais je dois avouer que c’est l’écriture qui m’apporte le plus de satisfaction depuis un certain temps.