Une fabuleuse machine, Anthropologie des savoirs ordinaires sur les fonctions physiologiques, Christine Durif-Bruckert.

C’est à une traversée surprenante du corps intérieur à laquelle nous invite Christine Durif-Bruckert. Pour effectuer ce fabuleux voyage, elle a invité des personnes de toutes origines sociales à raconter comment ils se représentent l’anatomie et la physiologie. À partir des différents niveaux d’expression de chacun, des images-clefs se dégagent, témoignant d’un arrangement minutieux de l’intériorité et de l’organisation sensible des mécanismes vitaux. Cet univers reconstitué se développe comme une véritable fresque organique faite de nuances, de reliefs, de creux, de surfaces lisses ou granuleuses.

Tous les organes ont un rôle à jouer. Le foie, tel un surmoi physiologique, surveille et réglemente les entrées et les sorties, l’estomac transforme l’aliment étranger en nourriture pour soi, les canaux sanguins portent le rythme du corps là où les conduits nerveux « tendent et tiennent la chair ». Quant au cerveau qui « surplombe l’ensemble » il tente d’assurer les jonctions entre le sensible et le raisonnable. Autant de théories inventives qui persistent à opposer aux savoirs scientifiques une résistance inaltérable, parfois même arrogante. Ce qui en émerge, c’est la part du sensible et du désir, celle que la science chasse et qui ressurgit dans les figures de l’intériorité avec une vivacité bouleversante.